Week-end eau vive dans les Cévennes du 14 au 16 mai 2016

Les Cévennes, certainement pas une destination très exotique (encore que, nous naviguions en dessous du 45e parallèle Nord). C’est pourtant que la destination que Bilal et moi avons retenu pour notre weekend (très) grosse navigation, accompagnés de quelques cadors de l’eau vive. Nous étions soit en camping sous tente (vendredi et dimanche soir), soit en bivouac (samedi soir). La difficulté de navigation allait de la classe IV à la classe VI. Le spectacle était au rendez-vous, entre les marches arrières, les bains, les pointes en l’air, et les esquimautages qu’on a fini par arrêter de compter.

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Panorama à Ste Énimie

Après 3h de route, nous arrivons au camping municipal de Bagnols-les-Bains à 23h30 le vendredi 13 au soir. Nous nous installons rapidement, et profitons d’une grasse matinée car le RDV est fixé à 11h, au camping même! Dans un souci d’anticipation, j’ai réservé et prévenu le gérant après avoir posé la tente et la voiture sur un emplacement au hasard.

J1 – Haut Lot – Gorges de Sainte Hélène (cl. IV-IV+)

Bien que le RDV ait été fixé à 11h, le groupe est déjà au complet à midi. Un 3e Lyonnais nous rejoint: Jérôme du CKTSV, en plus de Fred (accompagné de sa femme Laurence et de son fils Ylan), Pascalou (accompagné de sa femme Pauline et de ses fils Paul et Gabriel), Denis, Philippe, Fabien, Guillaume (pas notre Grenouille), et ceux que j’oublie… Au final nous étions une petite quinzaine à naviguer. Une fois les présentations faites, nous embarquons sur le Lot pour le parcours des Gorges de Sainte Hélène (10km) de difficulté globale IV (si l’on ne compte pas le premier kilomètre de cl. III pour s’échauffer) avec deux passages IV+. Dès le départ nous arrivons sur un tronc d’arbre que nous devons porter. Vient ensuite rapidement un barrage qui se saute avec de la vitesse et une giclée, barrage que j’ai choisi de porter. Les hostilités démarrent à partir de ce point, avec un enchaînement manoeuvrier se terminant par un seuil étroit avec une main gauche à mettre pour bien orienter le bateau pour la sortie, le tout valant bien IV+. La suite est un seuil-glissière de 3m, où Denis aura baigné à l’entrée, et où j’aurai également esquimauté. La dernière partie est composée de grilles en cl. IV, où souvent plusieurs passes sont possibles.

Il est seulement 15h30, et Bilal repart avec d’autres kayakistes se refaire une deuxième descente, pendant que les autres prennent leur picnic. Le programme du lendemain n’est pas encore arrêté, Fred penche plutôt pour un Tarnon, alors que Pascal envisage plutôt la Gourdouze. En attendant, je retourne à Bagnols-les-Bains chercher du pain et faire le plein, où j’avais d’ailleurs oublié que dans ces contrées lointaines, on paie APRÈS s’être servi.

Nous nous retrouvons à Sainte Énimie, magnifique village des Gorges du Tarn, où nous avons posé camping-cars et tentes au bord du Tarn. Pascalou et Fred en ont profité pour pêcher et ont bien failli attraper deux truites. Finalement, nous nous serons contentés des pâtes avec une excellente sauce aux morilles ramassées par Pauline et Laurence pendant notre navigation. Hugo, si tu me lis, cette partie basse du Tarn pourrait faire une très belle sortie en kayak de mer!

J2 – Gourdouze – 1 km avant la confluence avec le Luech (cl. V)

Au petit matin, Jérôme nous fait la surprise des croissants et pains au chocolat chocolatines. Finalement, Pascalou retrouve des amis qui veulent aller sur le Tarnon. Fred le rejoint, alors que Bilal et moi décidons de rejoindre Guillaume, Fabien et Philippe sur la Gourdouze, accompagnés d’autres kayakistes, dont deux BE, et de Denis comme photographe depuis le bord. Nous naviguerons jusqu’à la confluence avec le Luech, où nous avons prévu de continuer sur quelques km. Nous ne le savons pas encore, mais cette descente restera dans les annales!

La Gourdouze est une rivière magnifique, mais pas à la portée du premier kayakiste venu, car la difficulté générale est en V (avec un passage VI que nous avons porté). La pente est énorme: plus de 12% (107m de dénivelée sur un parcours de 840m)! La rivière met d’entrée de jeu dans l’ambiance, avec une glissière en IV+ très scabreuse, franchie seulement par Fabien. La suite est composée de glissades sur la roche mère et de seuils à bien négocier. Et c’est l’approche sur une chute de 5m où la négociation de l’entrée est importante pour une arrivée en douceur, d’autant plus que le portage est très difficile voire impossible. Tout le monde passe bien, certains arrivent à plat, d’autres comme Bilal atterrissent avec la pointe avant verticale.

Nous arrivons ensuite sur un enchaînement de glissières, précédé par un passage VI, que nous portons tous. Nous rembarquons à l’américaine juste en dessous, pour s’élancer sur la double glissière, avant de débarquer pour repérer et admirer le clou de la descente: l’accélérateur de particules, une glissière suivi d’un seuil et d’une équerre. Bilal s’est même fendu d’un esquimautage dans l’équerre, alors que Guillaume et moi avons décollé tellement loin que nous avons atterri dans le contre de l’autre côté de l’équerre! Arriver avec la bonne incidence est crucial pour passer correctement l’étroiture en virage avant l’équerre car une fois engagé, il faut attendre la fin (arrivée à Mach 2 en bas) pour pouvoir envisager de contrôler à nouveau son embarcation. Nous portons une nouvelle fois un rapide à cause d’un arbre coincé dedans et nous rembarquons pour un seuil de 3m, le tout dans le cadre magnifique de la confluence du Luech et de la Gourdouze.

Dès la confluence avec le Luech, il y a un chaos en cl. VI que nous portons, et nous en profitons pour aller repérer la chute de 7m qui suit. La passe de droite est à proscrire, celle de gauche est une glissière géante. Pourtant cette chute n’inspire confiance à personne sauf Bilal. Pareil pour le verrou qui suit. Cependant la suite de la mini gorge a l’air plus amicale (« du V ludique » dixit Pascalou), mais comme seuls Bilal et moi étions motivés, j’ai décidé de suivre le groupe et de porter. Ce portage s’est avéré être une opération sanglier (c’est-à-dire au milieu de la caillasse, des ronces et des arbustes piquants. Pour préserver nos k-ways, nous les enlevons (ce qui permet par la même occasion de mieux supporter l’effort avec le soleil qui tape). Le portage a bien duré une demie heure, et était tellement éprouvant que la plupart décide d’arrêter, tandis que Fabien, Guillaume, Bilal et moi continuons sur la fin de la rivière (grilles en cl. III-IV). 200m plus loin arrive une grille que je passe en marche arrière, pour terminer dans un rappel et finir sur le toit sous un bloc rocheux, heureusement que Fabien était là pour me présenter sa pointe, car j’avais perdu ma pagaie! Et c’est l’arrivée, et le picnic bien mérité! Arrive la question: « où dort-on ce soir? ». En effet nous hésitons entre le Haut Tarn et le Lignon du Velay, choix vite arrêté. Nous reprenons la route vers Pont de Montvert, où nous tombons sur Pascalou et Fred. Au passage, nous apercevons une belle chute: le gouffre de l’Oule (chute que nous franchirons le lendemain). Des amis de Pascal nous rejoignent, nous nous installons au camping municipal et nous préparons un grand Tajine (nous sommes 15 tout de même!), déclaré conforme par Bilal.

J3 – Tarn – Haut Tarn (cl. V(VI))

Aaaah, le Haut Tarn! Un must des Cévennes, grand classique français, dans un cadre magnifique, rivière très exigeante physiquement et techniquement, d’autant plus que nous avions beaucoup d’eau (2m30 à l’échelle de Cocurès), les rapides de cl. V s’enchaîne à grande vitesse, notamment sur les 2 premiers km. Étant levé avant la plupart des membres du groupe, je vais à la boulangerie de Pont de Montvert, qui a fait grâce à moi la recette de la semaine si ce n’est du mois (je lui ai pris tous ses croissants et ses chocolatines), le tout sous les regards dépités des randonneurs qui faisaient la queue derrière moi, voyant partir les viennoiseries les unes après les autres. Ben quoi?! J’ai 15 kayakistes à nourrir!

Nous commençons par le gouffre de l’Oule, sous les yeux surpris des randonneurs et habitants du village, qui nous prennent pour des fous. Un premier rapide, au nom pas très glorieux, vient donner le ton de la descente: le rapide des Poubelles (cl.V), avant d’attaquer les choses sérieuses, à commencer par le gouffre des Meules (cl.VI). Ce rapide fait à lui tout seul la réputation de force tranquille du Haut Tarn. L’entrée, technique et manoeuvrière est cotée en cl. VI, et la sortie en V: un grand dévaloir avec un gros trou en réception, qui tabasse bien (Bilal et moi pouvons vous le confirmer car il nous a arraché nos jupes!). Fred baigne à la fin du dévaloir après deux tentatives d’esquimautage ratées.

Le rapide qui suit est celui de la Trompette (cl.V, un seuil à rappel suivi d’un dévaloir), que certains ont porté et que d’autres ont passé, plus ou moins en force. Suite à une erreur de gîte, je baigne dans l’entrée, mais grâce à la sécu, je remonte très vite au bord et évite donc la sortie à la nage, douloureuse pour les fesses et les sinus! Bilal s’est fait totalement enterré à la sortie, mais s’en sort grâce à un esquimautage.

Il y a tellement de rapides sur cette rivière qu’il serait impossible de vous conter tous les sketchs et passages, mais on retiendra le rapide de la Seringue où j’ai baigné à la toute fin après 3 tentatives d’esquimautages ratées, la planche à laver (slide de 6m de haut) où l’entrée est capitale pour ne pas se faire déséquilibrer par le becquet du début et le caillou en réception.

On notera également un autre rapide où il faut slider à droite sur la roche mère pour éviter une bille en tête à gauche. Le gouffre de l’Hermet aura vu Bilal se mettre en cravate qui s’est soldée par un bain, et un esquimo avec les mains pour moi, le passage du gouffre en marche arrière sans pagaie (celle-ci a eu le bon goût de se coincer sous un caillou). Un des derniers (mais surtout pas le moindre) rapides est le seuil du Cougnet, assez dangereux par le gros rappel qu’il génère. Il faut passer au milieu, mais Bilal passe à gauche, sans mettre de giclée, esquimaute deux fois et finit par baigner. Je subirai le même sort, à ceci près que j’aurai franchi encore une fois le seuil en marche arrière. C’est la fatigue qui commence à se faire sentir!

La fin approche et permet de finir en douceur (à relativiser par rapport à ce que nous venons de faire) jusqu’à la retenue de La Vernède, avec cependant deux heures de retard sur le planning annoncé à Laurence et Pauline, qui commençaient à s’inquiéter d’ailleurs.

Un grand merci à tous les kayakistes et non-kayakistes présents sur les trois jours, à ceux qui nous ont encadrés et fait la sécu.

Le montage vidéo est par là: https://vimeo.com/168232826